Editorial: 3, 2, 1… 10%!

Editorial

À l’heure où nous écrivons ces lignes, la hausse de la taxe à la consommation semble actée. Après deux reports, elle passera de 8 à 10% le mois prochain. C’est un événement économique majeur pour le pays, où cet impôt occupe une place centrale dans la conscience collective des contribuables. Instaurée très tardivement (1989), elle est constamment rejetée par l’opinion publique. Et pour cause : historiquement, chaque hausse de la taxe à la consommation s’est traduite par un brutal coup de frein sur la croissance – assorti d’un revers électoral pour le pouvoir qui avait osé une telle mesure.


Cette hausse est soutenue par le ministère des Finances, logiquement effaré par l’état des finances publiques du pays, et, plus étrangement, par le patronat japonais. Quel sera son impact cette fois ? Dans une étude parue en mars, Goldman Sachs a étudié les dépenses de base (aliments de première nécessité…) et les dépenses discrétionnaires (télévisions, réfrigérateurs…) des ménages après la dernière hausse de la taxe en avril 2014. L´étude montre que les dépenses discrétionnaires, qui représentent 40% des dépenses d’un ménage et sont les plus coûteuses du foyer, ont bondi en anticipation de la hausse, mais qu’elles ont fortement chuté (-5,3%) l’année après pour se stabiliser. Le phénomène le plus préoccupant est peut-être l’inévitable chute des dépenses récréatives (tourisme, spectacles…), qui représentent en moyenne plus de 10% des dépenses des ménages. Les restaurateurs qui ont échangé avec FJE sont particulièrement inquiets.


Les dépenses de base avaient aussi accusé le coup pendant six mois en 2014, pour se rétablir rapidement (+1,5% au bout d’un an). Cette fois, l’impact devrait être atténué, les aliments à emporter étant exemptés de la hausse (au même titre, très curieusement, que les quotidiens). D’autre part, une partie des recettes sera affectée à la mise en place de la gratuité des premières années d’école pour les enfants de 3 à 5 ans au Japon ; cette mesure, d’après Goldman Sachs, permettra d’augmenter le pouvoir d’achat des ménages en âge d’élever des enfants au point de compenser la perte que représentent deux points de hausse de taxe à la consommation.


Si l’État japonais s’attache à trouver de nouvelles recettes, il semble avoir oublié qu’il pourrait aussi agir sur les dépenses (+17% en dix ans). L’inflation semble restreinte à Kasumigaseki, quartier des ministères.
Enfin, une énorme part des recettes collectées sera affectée à des travaux publics. Le secteur des services aux personnes âgées recevra 32 fois moins d’aides que celui du bâtiment. Or ce dernier ne semble pas, à slalomer entre les travaux dans les rues de Tokyo ou d’Osaka, se trouver plus en état de nécessité que le second.

 

 

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