La ligne de départ

Sébastien Paës dirige le comité “jeunes professionnels” de la CCI. Son ambition : partager l’expérience de ceux qui ont su marier travail, passion, vie au japon pour rassembler et inspirer. Il revient sur les raisons de venir dans l’archipel.

Pourquoi chercher du travail au Japon quand on est Fran­çais ?

D’abord parce qu’il y en a ! Le Japon fait partie des pays développés qui recrutent des étrangers et la qualité de vie peut être meilleure qu’en France à diplôme équivalent. Mais soyons honnêtes : on tente surtout l’aventure pour "vivre le Japon" plutôt que pour y travailler.
La barrière à l’entrée est élevée : langue, distance, codes… Il faut bien choisir son "cheval", car de l’équipementier japonais à la société de logiciel américaine, selon vos aspirations, le rêve côtoie le cauchemar…

Qu’apprend-on en travaillant au Japon ?

Le Japon est une remarquable école qui peut équilibrer et compléter certains traits français, surtout quand on le découvre jeune. J’ai vraiment découvert ici les valeurs de qualité, service, loyauté et précision. À l’inverse, à nous d’introduire les concepts de flexibilité, priorités, émotions et improvisation. Ce jeu d’import-export vous apportera son lot de frustration et de remise en question, mais constitue in fine une enrichissante aventure sociale.

Quels types de jeunes étrangers rencontrez-vous ?

Il y a une grande variété de profils. Contrairement à d’autres pays, il n’y a pas de forte dominante sectorielle (finance à Dubai, IT à Singapour…). En simplifiant, je dirais qu’il y a trois voies : par le travail (notamment par la filière V.I.E.), par l’expatriation ou par amour du pays. L’expérience, le niveau d’intégration, les ressentis et enseignements associés en sont assez différents, mais dans chaque cas le Japon arrive souvent à nous conquérir.
Récemment je sens venir une vague IT qui rafraîchit les codes du travail ici et offre de nouvelles perspectives d’épanouissement professionnel.

Pourtant beaucoup de gens repartent au bout de quelques années...

Nous sommes une génération d’expérience plus que de confort matériel et même la meilleure des destinations appellera ensuite à en découvrir une autre. Ce pays est très complexe, ici votre enchantement n’a d’égal que votre curiosité, et peut durer longtemps !

Qu’est-ce qui attire les gens alors ?

Je dirais que les étrangers viennent encore pour des raisons extra-professionnelles au Japon. La culture du Japon, sa qualité de vie reconnue et le mirage d’une société psychédélique (déjà fort à mon époque, maintenant démultiplié par l’internet) composent un cocktail singulier, charmeur, de prime abord idéal.

Mais le Japon est encore très conservateur : la société, les codes de travail, les schémas de vie sont réactionnaires. Travailler dans une entreprise japonaise n’est pas une sinécure, mais si vous y voyez un trade-off avec la qualité de votre quotidien, pourquoi pas ?

J’ai l’impression que la jeune génération voudrait renier certains codes sociétaux. Elle est peut-être plus exposée au reste du monde, et donc plus intéressée à changer. Pour n’en citer que quelques-uns, l’inégalité des contraintes entre hommes et femmes, les critères de la « performance » professionnelle, les tyrannies de la vie sociale sont des sujets faciles à aborder avec des Japonais.

D’une certaine manière, femmes, étrangers et jeunes sont tous trois des minorités au Japon dont les vues et les intérêts se rejoignent...

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