Livres

Anne Frank au pays du manga
On craignait le pire en recevant, par la Poste, Anne Frank au pays du manga, bd reportage au cœur du Japon. Qui avait osé un titre si potache ? On appréhendait les raccourcis et le manque de sérieux pour un livre qui mélangeait des sujets aussi périlleux à manipuler que l’Holocauste, la bombe atomique et la responsabilité du Japon dans la Seconde guerre mondiale. Cette bande dessinée au contenu en partie interactif est un objet étrange, nouveau, dont on se demande au départ s’il est vraiment nécessaire.
L’ouvrage emporte pourtant la sympathie. La candeur des quatre personnages, qui devrait être un obstacle rédhibitoire, fait la force du livre. Ils se rendent au Japon, dont ils ne connaissent rien, pour tenter de répondre à cette question : Comment se fait-il que le Journal d’Anne Frank soit un des livres étrangers les plus connus au Japon, et que les Japonais semblent si mal à l’aise avec la guerre ? Saurait-on comparer Hiroshima et l’Holocauste ?

Le secret des bonnes histoires est sans doute qu’elles commencent par surprendre leurs propres auteurs. C’est ce qui se produit ici. Nous suivons les pérégrinations de ces quatre journalistes au Japon et vivons avec eux leurs étonnements, leurs débats. Tour à tour, comme eux, nous épousons leurs préjugés, puis nous les révisons. Nous nous scandalisons de ce qui les scandalise, avant de ressentir leur gêne lorsqu’ils se rendent compte qu’ils ont « pensé trop vite », comme nous le faisons tous. Ils prennent le temps de rencontrer des représentants politiques de l’extrême-gauche à l’extrême-droite. Ils ressortent souvent transformés de leurs interviews. Une phrase justifie à elle seule le livre : l’adage samouraï de Chiune Sugihara, Consul du Japon en Lituanie qui sauva des milliers de vies juives en 1942 : « Même un chasseur ne peut tuer l’oiseau qui vole vers lui en cherchant un refuge ».
Mais c’est Herminien Ogawa, l’interprète français-japonais qui est le plus émouvant de cette « bande des quatre ». Condamné à répéter les questions de ses employeurs français, il impose petit à petit son point de vue, balayant leurs certitudes. Le livre parvient, sous des dehors agaçants, à donner une épaisseur humaine à des questions que nous nous contentons, d’ordinaire, de débattre dans le confort de nos salons, entre personnes aux opinions étonnamment semblables.

Anne Frank au pays du manga, éd. Les Arènes et Arte.

Les écrivains contre la loi pour la protection des secrets d’État
Dans un manifeste publié le 6 décembre 2013 par le Pen Club japonais, association dont la vocation est de protéger la liberté d’opinion et d’expression, les écrivains contestent la loi pour la protection des secrets d’État adoptée dans la précipitation ce même jour par le gouvernement Abe. Soulignant l’entrave à la démocratie que cette loi représente, ils rappellent les erreurs dévastatrices dans lesquelles ce mode de gouvernement a autrefois fait sombrer le Japon. Par l’adoption de cette loi au mépris de tous les avis contraires, les signataires du manifeste considèrent que « le Parlement a perdu sa qualification à représenter le peuple japonais » et annonce à tous ceux qui ont participé à cette manœuvre qu’ils devront porter la responsabilité de ses effets sur la société japonaise. Les écrivains affirment qu’ils poursuivront leur lutte contre l’application de cette loi infâme et pour la liberté d’expression et d’opinion au Japon.

Les meilleures ventes de l’année 2013
Les deux grands distributeurs de la production éditoriale japonaise, Nihan et Tohan, ont publié le classement des meilleures ventes de livres en 2013. En tête, sans surprise : le dernier roman de Haruki Murakami, (que l’on pourrait traduire par Le sans couleur Tasaki Tsukuru et son année de pèlerinage), aux éditions Bungei Shunju, avec plus d’un million d’exemplaires vendus. Un éditeur coréen en aurait acquis les droits pour près de 700.000 euros, dépassant le record déjà exceptionnel du montant versé pour 1Q84 qui s’est vendu à plus de 2 millions d’exemplaires ! L’autre bestseller 2013 est l’essai publié par Ascom 47 choses à connaître pour ne pas se laisser tuer par son médecin du cancérologue Makoto Kondô, rendu célèbre en 1988 pour la publication d’un ouvrage contestant la nécessité de l’ablation du sein dans le traitement de ce cancer.

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