Zéro émission

Le Japon était l’homme invisible de la COP21. 

Les officiels japonais seraient presque déçus. Pour la première fois depuis 1999, leur délégation envoyée à Paris pour participer à la COP21 n’a pas reçu le prix du Fossile du Jour, traditionnellement remis chaque soir par le réseau international d’ONG Climate Action Network aux États ayant, plus tôt dans la journée, fait preuve d’un grave manque d’ambition en matière de politique climatique. Cette fois, la Belgique, l’Australie ou encore l’Arabie Saoudite ont reçu le prix honteux (l’Arabie Saoudite poussant la délicatesse jusqu’à aller le chercher et participer à la cérémonie). Mais pas le Japon, qui était pourtant régulièrement montré du doigt aux précédentes grandes conférences sur le climat. En juin dernier encore, il avait reçu trois fois ce prix peu convoité.

Si les négociateurs nippons ont pu, un instant, croire que cet « oubli » était lié à la force des engagements de leur pays, l’ONG nippone Kiko Network a expliqué à l’agence Kyodo que le réseau Climate Action Network avait plutôt épargné le pays car son influence sur les débats avait été perçue, cette année, comme négligeable. Plusieurs correspondants des médias japonais se sont d’ailleurs interrogés sur l’invisibilité de leur pays à la COP21. « Le Japon n’a pas contribué ni entravé le succès de cette conférence. La délégation japonaise s’est contentée d’essayer de convaincre ces grands pollueurs que sont l’Inde, la Chine et les États-Unis de participer à l’accord final », estime le représentant japonais d’une ONG présente à la COP21.

La Chine
Défendant le travail de sa délégation conduite par la ministre de l’environnement Tamayo Marukawa, le gouvernement assurait fin décembre que Tokyo avait discrètement réussi à faire entendre sa voix sur les points de l’accord qui lui importaient le plus. Avant même son départ pour Paris, le négociateur en chef de l’exécutif nippon, Atsuyuki Oike, avait expliqué que le Japon souhaitait que la totalité des États, développés comme émergents, quantifient précisément dans le texte final leur engagement à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
Sans la nommer, les négociateurs japonais voulaient notamment que la Chine, qui est le plus gros pollueur de la planète, précise les chiffres de son effort de réduction, même s’il restera toutefois, comme pour toutes les nations, purement volontaire. L’accord signé à Paris n’a, en effet, pas valeur de traité et les promesses de réduction des États ne sont aucunement contraignantes. Elles ne pourront donc donner lieu à aucune forme de sanction si elles n’étaient pas respectées. Pariant sur le principe de la « bonne foi », les négociateurs espèrent qu’une inscription dans le texte des objectifs de réduction poussera les gouvernements à jouer le jeu et évitera de créer des distorsions économiques entre les pays.
C’est dans ce cadre que Tokyo s’est engagé à réduire ses émissions de 26 % en 2030 par rapport au seuil de 2013, année record de rejets du fait de la mise à l’arrêt des réacteurs du pays et de l’augmentation de la production d’électricité dans les centrales thermiques conventionnelles.

Générosité financière
Pour convaincre les pays émergents de clarifier, à leur tour, leurs propres engagements, Tokyo avait annoncé avant même la conférence de Paris qu’il allait devenir l’un des plus gros contributeurs aux projets d’aide mis sur place par les pays riches en faveur des pays moins favorisés luttant contre le réchauffement climatique. Fin novembre, Shinzo Abe a ainsi assuré que le Japon contribuerait, chaque année, à partir de 2020, à hauteur de 1.300 milliards de yens, soit 10 milliards d’euros, à ces projets. Jusqu’ici, le pays évaluait son enveloppe annuelle « d’aide climatique » à environ 1.000 milliards de yens. Comme les autres contributeurs, Tokyo doit toutefois encore préciser le contenu exact de ces montants qui regroupent des projets privés d’entreprises (notamment dans l’énergie renouvelable) et des programmes publics.

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