Des places à investir

Pour de nombreux exportateurs, l'investissement avec production locale se substitue à l'exportation. Le volet investissement de l'accord sera important mais difficile à négocier.

 

Un bond
Les investissements japonais dans l'Union Européenne ont connu depuis dix ans une hausse spectaculaire. En stock, ils ont crû de 75%, selon le ministère des Finances japonais. Ils représentent aujourd'hui un chiffre d'affaires de 250 milliards d'euros par an. Les entreprises japonaises emploient plus de 470.000 personnes en Europe (en France seulement, 26599 personnes), a calculé le METI. Cette hausse des investissements s'est accompagnée d'une chute des exportations. Ainsi, depuis 2007, les exportations japonaises vers l'Europe ont baissé d'un tiers, pour revenir à leur niveau de 2002. En août dernier, le Japon a enregistré un déficit commercial record de 96 millions d'euros avec l'Europe. Les exportations automobiles et d'équipements industriels vers l'Europe se sont effondrées. La raison d'un tel ciseau ? Comme pour leur expansion aux États-Unis, les entreprises nippones veulent produire le plus près possible de leurs clients. Ainsi peuvent-ils mieux les connaître, et éviter de subir des barrières tarifaires et non tarifaires en exportant leurs produits. Pour Toyota, mieux vaut ouvrir une usine en France plutôt que d'incarner une menace industrielle... Pour le Japon s'ajoute le problème spécifique d'un yen toujours élevé. Les entreprises nippones investissent donc, littéralement, le Vieux Continent.

Pas intéressé
L'inverse est loin d'être vrai. Car le Japon de son côté conserve la position de lanterne rouge de l'OCDE en matière d'attraction des investissements étrangers. Ces derniers ne représentent que 2% du PIB japonais (contre 10% du PIB français, et 7% du PIB allemand). Il y a 23 fois plus de fusions-acquisitions entre l'Union Européenne et le reste du monde qu'entre le Japon et le reste du monde. En flux, selon Eurostat, le Japon a investi (quand ?)5,4 milliards d'euros dans l'Union Européenne, et cette dernière a investi 3,6 milliards dans l'Archipel en 2011. Ramené au PIB, le Japon attire moins d'investissements étrangers que la Grèce !
La langue, le niveau d'imposition et les coûts du travail sont les principaux obstacles à l'investissement, selon une enquête de la Commission. Les professionnels de la fusion-acquisition citent le manque de transparence des conseils d'administration, la faiblesse de l'actionnariat, et quantité d'obstacles qui semblent inhérents au fonctionnement de l'économie japonaise. « Ce système est profondément ancré dans la culture japonaise et ne sera pas changé facilement », reconnaît une étude de la Commission Européenne, qui refuse même, par prudence, de se prononcer sur l'opportunité de remettre en question ledit système.
« Il y a énormément de PME qui travaillent essentiellement avec un client japonais, et qui constatent la baisse de leur carnet de commandes. Elles devraient aller à l'étranger, mais ne le peuvent pas pour des raisons de moyens. Il y a donc des opportunités de rachat par des entreprises étrangères pour les intégrer, les promouvoir à l'international et pénétrer en même temps sur le marché japonais. Problème : il faut les trouver », explique Jean-Jacques Lavigne, de FIVES. Sa société, spécialisée dans la mise en place de process de production, a racheté avec succès deux entreprises japonaises. Bien qu'elle soit à l'affût pour de nouvelles acquisitions, qui représentent souvent une unique chance de survie pour les cibles, elle n'en trouve pas. «De nombreuses petites sociétés sont familiales. Elles préfèrent être rachetées par des Japonais, dont elles comprennent le mode de fonctionnement », explique-t-il en soulignant qu'une fois la transaction conclue, une société se gère tout aussi facilement au Japon que dans le reste du monde. Alors pourquoi se priver ?

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