Editorial : intégrer l'Europe au Japon

Editorial : intégrer l'Europe au Japon

La soirée du 1er février à Europa House, l’ambassade de la commission à Tokyo, pour célébrer l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange entre l’Union Européenne et le Japon le même jour, aurait converti les plus eurosceptiques.

« Je vais devoir convaincre ma femme de ne pas faire un bakugai (une “explosion de courses”) européen », plaisantait le ministre de l’Économie Toshimitsu Motegi devant un parterre de diplomates hilares, terminant son discours par une sorte d’Eurovision sonore : « Thank you, gracias, grazie, merci beaucoup ! » et le vice-ministre des finances Shinichi Isa de renchérir : « à minuit, les douanes appliqueront l’accord ! »

Le 1er février fut une date historique pour le Japon et l’Union Européenne. L’accord de partenariat économique entre les deux puissances est entré en vigueur à minuit. Il supprimera 99% et 97% des lignes tarifaires européennes et japonaises, sur une zone de 600 millions de personnes qui représentent 30% du PIB et 40% du commerce mondial. Les négociateurs ont calculé qu’il se traduira par une hausse de 2,7 milliards d’euros par an de chiffre d’affaires en plus pour les exportateurs européens, et 2,3 milliards d’euros pour les exportateurs japonais. Un des aspects les plus épineux de la négociation fût que Japonais et Européens ne négociaient pas exactement la même chose. Les premiers souhaitaient abaisser les barrières tarifaires de l’Union Européenne (en particulier sur le secteur automobile), tandis que les seconds avaient des revendications sur les barrières non tarifaires. Un certain nombre de ces dernières a été levé : fin de la “clause de sécurité” dans le ferroviaire (par laquelle les compagnies ferroviaires nippones influaient sur leurs propres normes), fin progressive des discriminations envers les concurrents européens lors des appels d’offres publics...

Le Japon a enfin consenti à reconnaître les indications géographiques (IG) européennes. 200 IG environ jouissent désormais de la même protection au Japon qu’en Europe. Par réciprocité, le Japon dresse désormais sa propre liste d’IGs, déjà riche de 73 noms, de la laque de Joboji au bœuf marbré de Kumamoto, en passant par les tomates Nango. Cette conversion est sans doute très importante : elle met l’accent sur les “terroirs” de l’Archipel, met en lumière les artisans les plus exigeants, leur permet créer de la valeur économique, gastronomique, touristique... Un authentique rapprochement philosophique entre le Japon et l’Union Européenne, d’excellente augure.

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