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L’Afrique, une terre de rivalités pour le Japon et la Chine
Le 17 avril dernier, en collaboration avec Sciences Po Alumni, la CCI France Japon a accueilli Roland Marchal, chercheur à CERI-Sciences Po pour une conférence sur la rivalité sino-japonaise qui s’exprime sur le continent africain.
Parmi les principales différences entre les activités des deux rivaux en Afrique, le Japon se concentre sur les pays qu’il considère être « des états pivots » tels que l’Afrique du Sud, le Kenya et le Nigeria, tandis que la Chine pose son regard sur la totalité du continent. Si le Japon décrit ses relations avec les pays africains comme celles entre un « donateur et (des) bénéficiaires », la Chine est extrêmement pragmatique dans ses démarches, ignorant les conditionnalités et adaptant ses outils financiers aux différentes situations sur le terrain.
Pendant les quinze dernières années, la Chine a ouvert en Afrique plus de centres linguistiques que le Japon pendant un demi-siècle. Selon Roland Marchal, le succès de la Chine sur le continent s’explique par son large éventail d’acteurs économiques sur place (les échanges entre la Chine et les pays d’Afrique ont représenté 179 milliards d’euros en 2015). Paradoxalement, ce que la Chine réalise actuellement reflète précisément ce que faisait le Japon pendant les années 1970 et 1980 : financer les infrastructures à travers des prêts.
39 pays africains ont soutenu la Chine contre la décision de la Cour de Justice Internationale d’implémenter des contrôles dans la mer de Chine méridionale. Selon Roland Marchal, le Japon peine à rattraper son rival, pas simplement pour des raisons d’échelle mais aussi parce que l’approche reste engoncée dans des postures trop formelles, souvent incomprises des dirigeants africains : on peut l’illustrer par les changements de l’expertise sur le continent africain. Universitaires et experts japonais se concentrent sur l’étude des situations économiques centrées sur les politiques d’Etat tandis que leurs homologues chinois s’intéressent aujourd’hui plus aux enjeux politiques et sociaux.
En 1993, à un moment où les médias mentionnant l’Afrique dans leurs gros titres ne s’intéressaient qu’aux conflits, le Japon a effectué un pas important avec la création de la TICAD (Tokyo International Conference on African Development), promouvant un dialogue de haut niveau entre les dirigeants africains et leurs partenaires dans le domaine du développement. Mais Tokyo n’a pas su bénéficier de l’intérêt qu’il avait alors suscité. L’approche au lieu de s’assouplir pour tenir compte des nouvelles réalités du continent est restée dans une épure trop formaliste et structurée par des relations d’une autre période qui devenaient obsolètes à cause de l’attitude des émergents et de la Chine vis-à-vis de l’Afrique.
« Nous ne donnons pas suffisamment d’importance aux éventuelles réactions des pays africains » a fait remarquer Roland Marchal en tant qu’« africaniste », terme qu’il a utilisé pour se décrire. Si avec l’arrivée de nouveaux acteurs sur le terrain – tels que la Turquie, l’Inde et le Brésil – la compétition entre le Japon et la Chine devra revêtir de nouvelles formes, Roland Marchal a indiqué que « l’Afrique restera le terrain de leur rivalité pendant encore longtemps ».