Les évaporés du Japon

Chaque année 100.000 personnes disparaissent au Japon. Deux français, une journaliste et un photographe, sont partis à leur recherche et les tirent de l’oubli.

Entre ces malheureux, un seul point com­mun : ils ont disparu. Ils se retrouvent dans l’oubli. Une dette qu’ils ne parviennent pas à rembourser, des obligations fami­liales ou professionnelles insup­portables les poussent, un jour, à soudainement se gommer de l’existence. 100.000 Japonais dis­paraissent ainsi volontairement chaque année. La journaliste Léna Mauger et le photographe Stéphane Remael sont partis à la recherche de ces "évaporés".

Ils tirent des oubliettes des destins saisissants, brisés, mais qui n’ont jamais réussi à couper les fils du passé : un fils pourchassé par son père, un mari qui retourne prendre des nouvelles de sa femme dix ans après l’avoir abandonnée, un frère qui rappelle sa sœur 65 ans après s’être enfui du domicile familial, à 12 ans ! Et cette épouse qui disparaît, non par amour mais parce qu’elle est aimée de son mari et du patron de celui-ci, et que le scandale couve dans sa petite ville de province... Et puis il y a ceux qui sont restés, qui ne comprennent pas le départ de leur proche. Qui attendent sans fin. Ce sont les plus pathétiques, les plus nus.

Le livre explore les recoins sombres du Japon : Sanya, quartier de Tokyo des travailleurs journaliers, "sans-papiers" de leur propre pays ; les camps de réédu­cation pour employés démotivés ; les agences de détectives chargées de retrouver les évaporés.
Léna Mauger a la délicatesse de ne jamais sombrer dans la socio­logie. C’est le livre de ses témoins autant que le sien, le journal intime qu’ils n’ont jamais tenu.

Les photographies de Stéphane Remaël, très fortes, sont des anti portraits : souvent de dos, avec des couleurs presque irréelles. Ces clichés donnent à la fois épaisseur et pudeur à ces person­nages qui, c’est le mot, "brillent par leur absence".

Les évaporés du Japon, Léna Mauger & Stéphane Remaël, ed. Les Arènes